Il est curieux de remarquer que les thèmes qu'il aborde sont toujours d'actualité aujourd'hui. Heureusement, une telle censure est presque inexistante en France à l'heure actuelle mais des dérives de la part des politiques sont toujours à craindre. C'est ainsi que nous devons tous nous battre pour concerver notre liberté d'expression intacte.
Petite indication aux lecteurs les moins fins : l'extrait ci-dessous de Voltaire est très ironique, il ne faut certainement pas le comprendre au sens premier!
Je vous laisse le découvir.
De l'horrible danger de la lecture de Voltaire.
Nous,
Joussouf Cheribi, par la grâce de Dieu mouphti du Saint-Empire
ottoman, lumière des lumières, élu entre les élus, à tous les
fidèles qui ces présentes verront, sottises et bénédictions.
Comme
(…) Saïd Effendi, ci-devant ambassadeur de la Sublime-Porte vers
un petit état nommé Frankrom, situé entre l'Espagne et l'Italie, a
rapporté parmi nous le pernicieux usage de l'imprimerie, ayant
consulté sur cette nouveauté nos vénérables frères les cadis et
imans de la ville impériale de Stamboul, et surtout les fakirs
connus par leur zèle contre l'esprit, il a semblé bon à Mahomet et
à nous de condamner, proscrire, anathématiser ladite infernale
invention de l'imprimerie, pour les causes ci-dessous énoncées.
1
. Cette facilité de communiquer ses pensées tend évidemment à
dissiper l'ignorance, qui est la gardienne des états bien policés.
2
. Il est à craindre que, parmi les livres apporté d'Occident, il ne
s'en trouve quelques-uns sur l'agriculture et sur les moyens de
perfectionner les arts mécaniques, lesquels ouvrages pourraient à
la longue, ce qu'à Dieu ne plaise, réveiller le génie de nos
cultivateurs et de nos manufacturiers, exciter leur industrie,
augmenter leur richesse et leur inspirer un jour quelque élévation
d'âme, quelque amour du bien public, sentiment absolument opposés à
la sainte doctrine.
3
. Il arriverait enfin que nous aurions des livres d'histoire dégagés
du merveilleux qui entretient la nation dans une heureuse stupidité.
On aurait dans ces livres l'imprudence de rendre justice aux bonnes
et aux mauvaises actions, et de recommander l'équité et l'amour de
la patrie, ce qui est visiblement contraire aux droits de notre
place.
4
. Il se pourrait, dans la suite des temps, que de misérables
philosophes, sous le prétexte spécieux mais punissable, d'éclairer
les hommes et de les rendre meilleurs, viendraient nous enseigner des
vertus dangereuses dont le peuple ne doit jamais avoir connaissance.
5
. Ils pourraient, en augmentant le respect qu'ils ont pour Dieu, et,
en impriment scandaleusement qu'il remplit tout de sa présence,
diminuer le nombre de pèlerins de la Mecque, au grand détriment du
salut des âmes.
6
. Il arriverait sans doute qu'à force de lire des auteurs
occidentaux qui ont traité des maladies contagieuses, et de la
manière de les prévenir, nous serions assez malheureux pour nous
garantir de la peste, ce qui serait un attentat énorme contre les
ordres de la Providence.
A
ces causes et autres, pour l'édification des fidèles et pour le
bine de leurs âmes, nous défendons aux pères et aux mères de ne
jamais lire aucun livre, sous peine de damnation éternelle. Et, de
peur que la tentation diabolique ne leur prenne de s'instruire, nous
défendons aux pères et aux mères d'enseigner à lire à leurs
enfants. Et, pour prévenir toute contravention à notre ordonnance,
nous leur défendons expressément de penser, sous les mêmes peines
; enjoignons à tous les vrais croyants de dénoncer notre
officialité quiconque aurait prononcé quatre phrases liées
ensemble, desquelles on pourrait inférer un sens clair et net.
Ordonnons que dans toutes les conversations on ait à se servir de
termes qui ne signifient rien, selon l'ancien usage de la
Sublime-Porte. (…)
Donné
dans notre palais de la stupidité, la 7 de la lune Muharem, l'an
1143 de l'hégire.
VOLTAIRE,
De l'horrible danger de la lecture,
1765
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